À la découverte des instruments de musique du monde

Quand on pense à l’apprentissage de la musique, on imagine souvent un élève face à son piano, sa guitare ou son violon. Ces instruments, incontournables dans l’enseignement musical en France, sont certes riches et formateurs… mais ils ne représentent qu’une infime partie de ce que le monde a à offrir en matière de sons, de rythmes et de traditions.

Partout sur la planète, des peuples ont inventé des instruments aux sonorités uniques, intimement liés à leur culture, à leur histoire et à leur manière de vivre la musique : harpes africaines, tambours polynésiens, flûtes andines, luths orientaux… Ces instruments dits “traditionnels” ne sont pas des curiosités folkloriques figées dans le passé : ils sont vivants, pratiqués et transmissibles, même à ceux qui n’en ont jamais entendu parler.

Et si, en complément des parcours classiques, on ouvrait les portes de l’enseignement musical à ces instruments du monde ? Dans cet article, nous vous proposons de partir à leur découverte : comprendre d’où ils viennent, comment ils fonctionnent et en quoi ils peuvent enrichir l’expérience musicale des élèves, petits et grands. Car parfois, il suffit d’un son nouveau pour éveiller la curiosité… et faire naître une passion.

Pourquoi s'intéresser aux instruments traditionnels ?

Dans un monde de plus en plus connecté, la musique est l’un des langages les plus puissants pour comprendre, ressentir et se relier à d’autres cultures. Les instruments traditionnels sont une porte d’entrée directe dans cette richesse culturelle. Mais au-delà de leur valeur patrimoniale, ils présentent aussi de nombreux atouts pédagogiques.

Ouvrir les oreilles à la diversité

Découvrir des instruments venus d’ailleurs, c’est apprendre à écouter autrement. Chaque instrument traditionnel porte une sonorité particulière, une logique musicale différente, parfois basée sur des rythmes irréguliers, des gammes non tempérées ou des timbres inédits. Cela permet aux élèves de sortir du cadre occidental, de développer leur curiosité auditive et leur capacité d’adaptation.

Stimuler l’apprentissage par l’exploration sensorielle

De nombreux instruments traditionnels sont très accessibles dès les premiers essais :

• On frappe un djembé  avec les mains,
• On souffle dans un didgeridoo  ou une flûte,
• On pince les cordes d’une kora  ou d’un charango…

Ce contact direct, sans médiation technique complexe, favorise l’apprentissage intuitif et donne rapidement le sentiment de "faire de la musique", même sans solfège.

Des instruments concrets, parfois faits main

Contrairement aux instruments classiques qui peuvent impressionner par leur technicité ou leur prix, certains instruments traditionnels sont faits à la main, avec des matériaux naturels (bois, calebasse, peaux…). Cela permet d’aborder la musique de manière sensorielle, tactile et artisanale, souvent très engageante pour les enfants et les débutants.

Une pédagogie plus inclusive

Certains élèves peuvent se sentir en difficulté dans un parcours musical standardisé. Les instruments traditionnels, par leur diversité de formes, de techniques et d’origines, offrent une alternative plus libre et valorisante. Ils permettent à chacun de trouver un point d’entrée dans la musique, en fonction de ses préférences, de sa culture ou de sa sensibilité.

👉 En s’ouvrant aux instruments du monde, l’enseignement musical ne perd rien : au contraire, il gagne en richesse, en souplesse et en humanité. C’est une autre manière d’apprendre… mais aussi une autre manière de transmettre.

Tour du monde des instruments traditionnels

Voici une sélection d’instruments traditionnels, authentiques et pédagogiquement riches, classés par grandes aires géographiques. Pour chacun, découvrez son origine, son fonctionnement, et son potentiel dans un parcours musical ouvert et créatif.

Afrique de l’Ouest

Djembe

Un tambour goblet en bois muni d’une peau, joué à mains nues. Originaire du Mali et de Guinée, c’est un pilier des cérémonies villageoises, festives ou initiatiques. Parfait pour apprendre le rythme, la coordination, et jouer en groupe dès le début.

> Mamady Keïta (Guinée) : grand maître du djembe, il a fondé l’académie Tam Tam Mandingue et a contribué à diffuser le rythme mandingue à travers le monde.

Balafon

Xylophone ou percussion mélodique avec lames de bois et résonateurs en calebasse. Présent depuis au moins le XIIᵉ siècle chez les Mandé (Mali, Burkina Faso). Idéal pour sensibiliser aux gammes, à la hauteur, et jouer collectivement des patterns de base.

Kora

Harpe-luth à 21 cordes, originaire du Mali et pratiquée par les griots (conteurs-musiciens). En apprentissage, elle permet de travailler la main droite/gauche, la polyphonie et initier à des techniques mélodiques complexes, à partir d’une posture simple.

> Toumani Diabaté (Mali) : l’un des plus célèbres virtuoses de la kora, il a ouvert ce 21 cordes au jazz, flamenco et musique classique. Il est reconnu pour ses différentes collaborations culturelles. 

Asie

Erhu

Vièle chinoise à 2 cordes frottées et archet, souvent appelée “violon chinois”. Instrument expressif, accessible dès l’enfance, pour travailler l’intonation et les émotions par le son.

Shamisen

Luth japonais à manche long et 3 cordes pincées, joué au plectre (“bachi”). Idéal pour découvrir les mélodies monodiques, l’accompagnement chanté (kabuki, folk), et les techniques de rythmique pure.

> Yoshida Brothers (Japon) : duo de shamisen virtuoses, ils ont révolutionné cet instrument traditionnel en y ajoutant une touche moderne et rock, avec des albums internationaux et des tournées mondiales.

Moyen‑Orient & Méditerranée

Le oud

Le oud (ou ‘ūd) est un luth à manche court et sans frettes, originaire du monde arabe, de Turquie, de Grèce et du Moyen‑Orient. Il est considéré comme l’ancêtre direct du luth européen. Son corps, typiquement en forme de poire, est constitué d’un dos arrondi en lamelles de bois assemblées, et il possède généralement 5 à 6 chœurs (courses de cordes doubles). C'est un instrument central des musiques arabes et méditerranéennes, qui a également été reconnu par l'UNESCO en 2022 comme patrimoine culturel immatériel de l’Iran et de la Syrie. 

> Anouar Brahem (Tunisie) : maître de l’oud, il a fusionné l’oud arabe avec le jazz et la musique contemporaine. Très actif depuis les années 1990, il brille sur la scène mondiale.

Darbouka

Tambour en forme de gobelet, peau synthétique ou naturelle. Très courant en Égypte, Turquie et au Maghreb. Excellent pour accompagner des ensembles, travailler les rythmes asymétriques et la dextérité des mains.

> Hossam Ramzy (Égypte) : percussionniste renommé pour son jeu de darbuka, il a accompagné de nombreuses stars mondiales et a contribué aux bandes‑sons de Peter Gabriel et de Robert Plant & Jimmy Page.

Amériques

Charango

Petit luth andin (Pérou, Bolivie), traditionnellement fabriqué avec une carapace de tatou. Accessible pour jouer des arpèges andins, développer une main droite agile.

> Jaime Torres (Argentine) : une icône du charango andin, il a popularisé cet instrument dans les années 1960–70 et a marqué la scène folk mondiale.

Maracas

Percussion à secouer, fréquente en Amérique latine. Simple et efficace pour apprendre le tempo, l’accompagnement rythmique.

Océanie

Didgeridoo

Instrument à vent australien des Aborigènes. L’un des plus anciens au monde. Permet d’explorer des techniques de souffle continu (circular breathing) et de travailler l’écoute des résonances.

To’ere

Tambour en bois de Polynésie, joué avec une baguette. Parfait pour travailler les rythmes syncopés, la nuance et la percussion en petit groupe.

Potentiel pédagogique

Ces instruments offrent :

• Diversité sonore  : approches tonales, rythmiques, mélodiques variées.
• Accessibilité immédiate  : jouer, sentir la musique directement, sans nécessité de solfège.
• Dimension sensorielle et culturelle : toucher, fabriquer, écouter aussi un savoir-faire historique.
• Travail collectif : percussions ou mélodies, parfaits en ateliers ou en groupe.

Ces instruments peuvent servir en éveil musical, en ateliers interculturels, à compléter un parcours classique, ou même comme support de création collective.

Les artistes cités sont non seulement des virtuoses, mais aussi des passeurs culturels. Ils montrent que ces instruments ne sont ni figés dans le passé ni anecdotiques : ils sont vivants, adaptables et inspirants. Intégrer ces sonorités en cours, c’est offrir aux élèves une fenêtre sur le monde, et éveiller les passions à travers des traditions musicales contemporaines et dynamiques.

Comment intégrer ces instruments dans un parcours pédagogique ?

Introduire des instruments traditionnels dans l’enseignement musical peut sembler inhabituel dans un cadre scolaire ou associatif classique. Pourtant, ces instruments offrent de nombreuses possibilités pédagogiques, à condition de les intégrer avec simplicité, curiosité et ouverture.

Voici quelques pistes concrètes pour les faire entrer dans une pratique musicale vivante, ludique et inclusive.

En éveil musical : découvrir par le jeu et les sens

Les instruments traditionnels sont particulièrement bien adaptés à l’éveil musical des jeunes enfants. Leur diversité de formes, de sons, de matières et de modes de jeu stimule :

• L’écoute active

• La motricité fine et globale

• Le rapport au rythme et à la pulsation

Une valise d’instruments du monde peut devenir un support d’exploration libre ou de séances thématiques.

En cours collectifs : travailler l’écoute et le jeu en groupe

Les percussions traditionnelles (djembé, darbouka, bombo, to’ere...) sont idéales pour initier au jeu d’ensemble :

• Chaque élève a un rôle rythmique simple,
• On travaille les entrées/sorties, les appels, les nuances,
• L’écoute mutuelle est naturellement sollicitée.

Les instruments mélodiques (balafon, kora, erhu…) peuvent aussi être introduits en binôme avec un instrument plus familier (piano, guitare), créant des duos interculturels enrichissants.

Objectif pédagogique : faire comprendre la musique comme un dialogue entre sons, cultures et intentions.

En ateliers interculturels ou thématiques

Ces instruments peuvent servir de point de départ pour des projets pédagogiques plus larges :

• Semaine culturelle  autour d’un pays ou d’un continent,
• Rencontre avec un musicien invité  ou une association locale,
• Création collective  à partir de sons et rythmes du monde.

Ils deviennent alors des supports de transmission culturelle, d’expression orale, d’écoute et de créativité, au-delà du cadre musical strict.

En complément d’un parcours classique

Les instruments du monde peuvent venir enrichir l’apprentissage d’un instrument “classique” :

• En travaillant le rythme  autrement (ex. : percussion + piano),
• En explorant une autre manière de construire des phrases musicales,
• En découvrant des gammes, modes ou accords différents

(ex. : maqâm, gammes pentatoniques…).

Exemple : un élève en guitare peut apprendre une mélodie andine au charango, ou un élève en chant peut s’accompagner à la kora.

Le rôle du professeur : transmettre, guider, expérimenter

Pas besoin d’être expert en musique traditionnelle pour utiliser ces instruments : il suffit d’en respecter l’origine, d’en comprendre les grands principes, et de s’autoriser à explorer avec les élèves.
Des ressources en ligne, des vidéos pédagogiques et des musiciens invités peuvent enrichir l’expérience.

En intégrant même ponctuellement un instrument traditionnel dans un parcours pédagogique, on ouvre une porte : celle d’un autre rapport à la musique, plus intuitif, plus sensoriel, multiculturel. Et c’est souvent cette porte qui donne envie d’aller plus loin.

Où les découvrir et comment commencer ?

Découvrir et pratiquer des instruments traditionnels du monde peut sembler intimidant quand on ne vient pas de ces cultures. Pourtant, il existe aujourd’hui de nombreuses ressources accessibles, aussi bien en ligne que dans les territoires, pour se familiariser avec ces instruments et les intégrer dans un parcours musical, même sans bagage spécialisé.

Dans les écoles de musique et les associations

De plus en plus de conservatoires, MJC et écoles de musique proposent des ateliers de percussions africaines, de musiques du monde ou d’éveil interculturel. Ces formats sont souvent ouverts à tous les niveaux et animés par des musiciens spécialisés dans un répertoire (musique mandingue, musiques arabes, andines, etc.).

Certains enseignants indépendants ou associations locales (souvent liées à la culture ou à la solidarité internationale) proposent aussi des initiations à des instruments spécifiques, parfois avec prêt d’instruments à la clé.

Chez Allegro Musique : des cours de percussions du monde à domicile

Allegro Musique propose, au-delà des percussions classiques, des cours de percussions africaines ou orientales à domicile, partout en France. On peut notamment y apprendre des instruments comme le djembé ou la darbouka, avec des professeurs spécialisés, capables d’adapter leur pédagogie à tous les niveaux. Ces cours permettent de découvrir des rythmes traditionnels issus de différentes cultures tout en bénéficiant d’un accompagnement individualisé. Une excellente manière de s’initier aux instruments du monde dans un cadre professionnel, sans avoir à chercher loin.

Dans les festivals et événements culturels

De nombreux festivals de musique proposent des ateliers de découverte gratuits ou à prix libre :

(ex : Africajarc, Festival du Chant de Marin, Les Suds à Arles…),

Journées du patrimoine avec animations autour d’instruments traditionnels,

Rencontres interculturelles, souvent organisées par les villes ou les associations culturelles.

Participer à ces événements permet souvent de voir, entendre, essayer un instrument dans un contexte vivant et convivial.

En ligne : vidéos pédagogiques et initiation à distance

Internet regorge de contenus pédagogiques gratuits ou accessibles :

Chaînes YouTube de musiciens spécialisés (par ex. : Toumani Diabaté pour la kora, Yoshida Brothers pour le shamisen),

Sessions de découverte animées par des musiciens du monde entier, parfois sous-titrées ou traduites.

Fabriquer soi-même ou acheter de manière responsable

Certains instruments traditionnels sont relativement simples à fabriquer lors d’ateliers pédagogiques :

• Maracas en calebasse ou en boîtes recyclées,
• Tambours d’eau, shakers ou mini balafons en bois local,
• Flûtes en bambou ou percussions corporelles.

Pour ceux qui souhaitent acquérir un instrument, il est conseillé de se tourner vers :

• Des luthiers spécialisés ou des artisans locaux,
• Des boutiques éthiques travaillant avec des coopératives à l’étranger,
• Des plateformes de seconde main (certaines percussions sont trouvables d’occasion).

Commencer simplement, avec respect

Pas besoin d’expertise pour débuter. Le plus important est de :

• Choisir un instrument accessible (djembe, maracas, balafon…),
• S’informer sur son origine et sa fonction culturelle,
• L’utiliser avec ouverture, respect et plaisir.

Intégrer un instrument du monde, c’est aussi raconter une histoire, faire entendre un autre timbre, ouvrir un espace d’écoute. Et cela peut tout changer dans la manière dont un élève entre en relation avec la musique.

Et si, pour ouvrir les oreilles… on commençait par ouvrir le monde ?

Les instruments traditionnels ne sont pas réservés à une poignée de passionnés ou à des musiciens folkloriques. Ils sont vivants, transmis, joués, enseignés et surtout, ils ont toute leur place dans l’apprentissage musical d’aujourd’hui.

Intégrer ces instruments, c’est offrir aux élèves une autre porte d’entrée vers la musique : plus sensorielle, plus culturelle, parfois plus intuitive. C’est aussi une manière de valoriser la diversité, de décloisonner les pratiques, et de donner à chacun la possibilité de trouver sa propre voix musicale.

Que ce soit en éveil musical, en ateliers collectifs ou en complément d’un cours à domicile, les instruments du monde peuvent transformer un cours en voyage, une découverte en révélation.